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Interview du général Martinez: "notre lettre est un cri d'alarme"

Le général Antoine Martinez est cosignataire de la "tribune des généraux" & candidat à la présidence de la République française en 2022.



Antoine Martinez, vous êtes né en 1948 à Oran, en Algérie française, vous avez 73 ans, vous avez été général de l’Armée de l’air et expert dans le domaine du renseignement. A la retraite vous vous engagez dans la défense de l'identité nationale et contre l'islamisation de la France. Le grand public commence à entendre parler de vous en 2016, quand vous prenez la défense du général de corps d'armée à la retraite Piquemal, arrêté à Calais pour avoir pris la parole lors d’une manifestation contre la politique migratoire, et qui pour cette raison sera radié des cadres de l’Armée. En 2018 avec dix autres généraux, un amiral et un ancien ministre de la Défense, vous demandez à Emmanuel Macron de ne pas signer le pacte de Marrakech sur les migrations, car cet acte pourrait constituer une trahison. En 2021 vous récidivez avec la fameuse tribune intitulée « Pour un retour de l’honneur de nos gouvernants », mais cette fois avec vingt généraux, une centaine de hauts gradés et plus d'un millier d'autres militaires à la retraite. Cette lettre à Emmanuel Macron, qui pointe du doigt le "délitement" de la France et l’éventualité d’une guerre civile, a déclenché une énorme polémique en France et a fait le tour du monde. 24 000 militaires auraient cosigné cette lettre. Et ce lundi 10 mai 2021, une pétition de militaires, toujours en activité, apporte un total soutien aux signataires retraités de la précédente tribune, tant sur leurs personnes que sur leurs propos. À ce jour, cette pétition a été lue par plus de 2 millions de personnes et signée par plus de . De plus selon un sondage, 6 Français sur 10 soutiendraient les militaires ayant signé votre tribune. Enfin, vous avez décidé d’être candidat à la présidence de la République française en 2022.

Quelle est la raison de votre appel avec ces généraux, officiers et militaires ?

La situation de la France qui ne cesse de se dégrader du fait de l’immigration. Cette dernière a commencé dans les années 70 et s’est développée avec le regroupement familial et l’arrivée au pouvoir des socialistes lors des présidences de François Mitterrand de 1981 à 1995. L’arrivée de personnes qui sont devenues au fil des ans, surtout à la fin des années 90, des populations d’immigration de masse, de culture et de civilisation totalement différentes. Et le problème, c’est humain, quand on arrive ainsi en masse on a plutôt tendance à se regrouper dans le cadre de cette culture à laquelle on appartient. Hélas, on le voit sur le terrain, cette culture nous est hostile. Or à partir d’un certain nombre, non seulement les groupes humains de même culture et civilisation ont tendance à se regrouper mais aussi à vouloir imposer leur propre vision du monde. Nos hommes politiques, qui doivent assurer le bien commun et l’intérêt de l’État et de la nation, ont d’abord fait preuve de laxisme, puis de pusillanimité, de manque de clairvoyance sur l’avenir et désormais font preuve d’un déni de réalité. Les choses se sont aggravées progressivement et nombre de dirigeants politiques n’ont pas voulu les voir. Aujourd’hui nous en arrivons à des violences urbaines qui se répètent un peu partout, des attaques à l’encontre de nos forces de l’ordre qui ne peuvent plus pénétrer dans certains secteurs pour « ne pas provoquer ». Il manque une volonté à nos politiques d’assumer leur mission. Tout cela nous a obligés à écrire une lettre ouverte au président de la République, au gouvernement et à tous nos parlementaires. Cette lettre ouverte est un cri d’alarme ! Un cri d’alarme à nos dirigeants pour leur dire que s’ils ne décident rien, ne font rien, nous allons inévitablement, inexorablement, vers une confrontation, une guerre civile. Ce que nous ne voulons pas !

Que répondez-vous à ceux qui vous accusent de vouloir un putsch ?

(Rire) Non et non. C’est une interprétation de certains, une interprétation très malhonnête. Il faut bien comprendre que les généraux qui ont signé cela sont à la retraite, en plus on ne se connaît pas tous très bien, dans ces conditions il n’y a aucun risque ! Même si de plus en plus de personnes nous rejoignent, car il y a désormais plus de 30 000 militaires qui ont signé cette tribune et plus de 60 généraux à la retraite ! Le nombre de généraux signataires a triplé, malgré les menaces de sanctions annoncées par le gouvernement contre nous, qui s’ajoutent aux déclarations humiliantes nous assimilant à des putschistes fascistes ou à des généraux en charentaises (pantoufles), critiques tout de même contradictoires et ridicules. Le soutien à 60% des Français pour notre tribune a sûrement surpris et étonné nos gouvernants. Maintenant c’est à nos dirigeants politiques de prendre leurs responsabilités.

Qu'attend la France si les demandes des signataires ne sont pas satisfaites ? Pour les signataires, si le gouvernement ne fait rien, nous allons droit vers une guerre civile avec emploi de nos forces armées. Pour vous, il reste encore combien de temps pour inverser les choses ?

Du temps nous n’en avons plus. C’est notamment la raison de ma décision de me présenter à la prochaine élection présidentielle en 2022. Ce rendez-vous de 2022 constitue pour nous un point de non-retour. Si rien n’est fait, si Emmanuel Macron était reconduit pour cinq ans, je crois que la France se trouverait dans une situation dramatique. Nous avons très peu de temps pour réagir. La meilleure preuve est la déclaration du propre ministre de l’Intérieur de Macron, l’homme le mieux renseigné de France : le socialiste Gérard Collomb, qui le jour de sa démission avait déclaré « Aujourd’hui on vit côte à côte, je crains que demain on vive face à face ». Toutes ces violences urbaines démontrent que désormais nous avons un ennemi intérieur. Ces violences sont une véritable guérilla urbaine et ces individus radicalisés ne sont pratiquement jamais sanctionnés.

Mais ne seriez-vous pas un peu trop optimiste, comment croire que nos politiques vont changer cela ? Que ce soit la droite ou la gauche, la politique est toujours la même depuis quarante ans en France. Non seulement on laisse entrer des populations hostiles, qui chez elles, à l’école, à la mosquée, à la TV sont endoctrinées par leurs États à nous détester. Et qui quand elles arrivent en France sont accueillies par des ONG de gauche décolonialistes, qui les confortent dans leurs opinions en leur disant que nous sommes un pays raciste. Que faire avec une telle classe politique ?

Vous avez raison, ce n’est pas pour rien qu’en France, le premier parti est celui des abstentionnistes. Les Français ne vont plus voter, non parce que la politique ne les intéresse pas, mais parce qu’ils sont désespérés, ils sont en colère et que voter ne sert plus à rien, que ce soit la gauche ou la droite qui arrive au pouvoir. C’est d’ailleurs pour cela que je me présente à la présidence, car moi non plus je ne peux comprendre comment des dirigeants politiques qui sont de droite ou de gauche, ne comprennent pas que leur mission première est de protéger leur pays et leur peuple. Nos dirigeants ont une idéologie progressiste qui considère que vouloir défendre l’identité d’un pays est quelque chose de honteux. Je suis effaré, sidéré de cela. Je considère que tout peuple, toute nation a le droit de défendre son identité, ce qu’elle est, son histoire, ses traditions, sa langue, nous sommes les héritiers d’une histoire dont nous devons être fiers. Et quand Emmanuel Macron veut à tout prix garder les frontières ouvertes, prône une politique progressiste, c’est vouloir participer activement au délitement de notre pays et de notre nation. Et tout peuple, toute nation a le droit à sa continuité historique et donc de vouloir défendre ses racines, son héritage, qu’il soit historique, spirituel, culturel. Moi, je considère que c’est non seulement un droit, mais un devoir.

Justement, parlons du progressisme, vous ne pensez pas que c’est le principal problème ? Dans tout l’Occident, les progressistes ont pris le pouvoir : dans les partis politiques, syndicats, médias, grands groupes, les administrations, les institutions. Et les citoyens ouvertement chrétiens et conservateurs, eux, sont de plus en plus exclus du débat public et des postes à responsabilité, justement au sein des administrations, grands groupes, universités, partis politiques, syndicats, médias, industries des loisirs et de la culture. Il existe même maintenant, un véritable harcèlement judiciaire dès que les porte-parole du conservatisme expriment leurs opinions sur l’immigration, l’islam. Si vous ne récitez pas le crédo progressiste vous vous auto-excluez de tous les postes à responsabilité, quelles que soient vos qualités et compétences. L’exemple le plus frappant étant le président Donald Trump censuré par les médias et réseaux sociaux. Alors c’est vrai les « non-progressistes » ne sont pas encore condamnés à la prison, peuvent publier, ont des espaces, restreints, où ils peuvent s’exprimer. Mais tout de même, ne peut-on dire que désormais l’on vit sous un totalitarisme progressiste « doux » ?

Absolument, pour reprendre l’exemple du président Trump, on l’a bien vu. Et d’ailleurs la chaine de télé CNN a été amenée à avouer que tout a été fait par les médias américains pour déstabiliser et faire perdre le président Trump. Dont je trouve qu’il avait parfaitement raison de vouloir faire passer les intérêts des USA en premier. Je considère que c’est le premier rôle d’un représentant politique de dire « mon pays, ma nation d’abord. »

On a l’impression que vous avez un discours de rupture mais que vous croyez encore au système, que l’on peut encore arriver normalement au pouvoir en France, dans un processus qui est tout de même très fermé, où comme on vient de le voir, les progressistes exercent une sorte de totalitarisme doux. Comment arriver au pouvoir quand on a tous les médias contre soi, tous les grands groupes contre soi ? Avec la répression contre les Gilets jaunes nous avons vu un véritable putsch contre le peuple. Dans votre tribune vous prenez la défense du mouvement des Gilets jaunes « historiques », avant qu’il ne soit infiltré par des casseurs et des voyous. Vous ne pensez pas que d’une certaine façon, en tant que membre de l’élite, vous arrivez après la bataille ? Qu’au final les élites françaises se divisent en deux : celles qui ont laissé faire un putsch contre le peuple français, et les autres qui l’ont trahi ?

Oui, bien sûr, même si au début des Gilets jaunes nous avons eu quelques généraux qui sont allés sur le terrain pour soutenir la population. Cette tribune, c’est justement le cri d’alarme, nous arrivons au bout du bout. Notre tribune et celle qui a été publiée par les militaires en activité est un signal ; le gouvernement va avoir une période difficile pour gérer cette affaire. Avec cette tribune, il y a manifestement un changement qui s’opère. Et je pense qu’il y aura un avant-tribune et un après-tribune.

Excusez-moi d’insister mais vous avez 83% des Français qui pensent que l’insécurité augmente de jour en jour, 70% en ont assez de l’immigration, 60% soutiennent votre tribune et même 1 Français sur 2 pense que l’armée devrait intervenir pour rétablir la sécurité même sans l’avis du gouvernement. Tous les sondages démontrent que les Français veulent un changement radical de politique migratoire et de sécurité ; malgré cela il n’y aucun parti de gouvernement qui reprend ces idées. Même le parti de gouvernement le plus à droite, Les Républicains, ne dit pas qu’il va stopper l’immigration mais « mieux la maîtriser »... C’est un peu un système à la Poutine, où il n’existe pas vraiment de concurrence (d’opposition?). Aussi, face à ce système de démocratie non représentative, seriez-vous prêt à appeler à des grèves générales en France ?

Nous sommes au mois de mai, à cette période de l’année les Français, malgré la situation du pays, n’ont qu’une idée en tête : les vacances. Mais à la rentrée, septembre/octobre, je pense qu’il risque d’y avoir certains mouvements possibles. Ce que nous avons déclenché avec cette tribune, c’est une prise de conscience croissante de nos compatriotes, et nous allons voir ce qui va se passer à la rentrée.

Quels types de liens entretenez-vous entre signataires, soutiennent-ils votre candidature à la présidentielle ?

Il y a déjà quatre généraux, dont le plus haut gradé le général de corps d’armée Piquemal. Je pense qu’au fil des prochains mois d’autres vont venir appuyer ma candidature. Je sais que parmi eux il y en a quelques-uns qui ne se sont pas encore officiellement prononcés mais qui soutiennent ma candidature. Avec les derniers événements et notamment la tribune des militaires d’active, il est fort possible que d’autres généraux viennent me soutenir.

Et que répondez-vous aux médias qui disent que vous roulez pour le RN ou que le but de tout cela est d’obliger Marine Le Pen à durcir son programme ?

Pour Marine Le Pen, l’islam est compatible avec la démocratie, pour moi non. Pour moi, et pour reprendre une célèbre formule : « L’islam est l’islamisme au repos et l’islamisme c’est l’islam en action. ».

Mais ne sommes-nous pas obligés de faire la distinction, rien que du fait qu’environ 10% de la population est musulmane ? Si l’islam n’est pas compatible avec la République, que faites-vous de toutes ces personnes ?

Oui nous avons des compatriotes de confession musulmane qui sont intégrés dans la société française, assimilés à notre nation, c’est bien évident. On a très peu de statistiques ethniques, car nombre de nos dirigeants ne veulent pas en entendre parler.

Justement parlons-en ! 95% des élites politico-médiatiques nient tout Grand Remplacement, c’est-à-dire un changement progressif et rapide de peuple et de civilisation par l’effet de la submersion migratoire. Pourtant il suffit de comparer les rues françaises ou photos de classe de 1970 et d’aujourd’hui pour voir, à l’œil nu, une différence. Même les chiffres sont éloquents. +20% de la population a des origines africaines (selon Emmanuel Macron), 20% des enfants qui naissent en France ont un prénom musulman, 40% des enfants qui naissent ont au moins un parent étranger. Dans certaines villes de Seine-Saint-Denis à Clichy-sous-Bois, Aubervilliers et La Courneuve, trois quarts de la jeunesse est d’origine étrangère, et même dans certaines villes moins de 5 % des jeunes sont d'origine européenne. Chaque année c’est l’équivalent de la ville de Nice qui entre en France. Si rien n’est fait, en 2050 l’islam sera la première religion et au moins un habitant sur deux, en France, aura des origines africaines. De ce fait, finalement, n’est-il pas vain de vouloir défendre l’identité française et combattre l’islamisation du pays ? Il faut peut-être prendre acte que la France est devenue un pays aux racines islamo-chrétiennes et de culture européo-africaine ?

Non. C’est la raison d’une part de cette tribune et d’autre part de ma décision de me présenter à l’élection présidentielle. Il est évident que le problème démographique est sous nos yeux. Je voudrais citer d’autres chiffes, ceux du rapport de l’Institut Montaigne, qui est loin d’être un institut extrémiste, qui nous révèle que 30% des musulmans sur notre territoire sont radicalisés, utilisent leur religion comme un outil de rébellion contre la France. Que 30% veulent instaurer la Charia, donc la loi islamique. 30% ! Et plus de 50% considèrent qu’ils veulent vivre avec leurs traditions, leurs coutumes.

Mais là encore une fois, comment est-il possible que nos dirigeants et médias qui connaissent ces chiffres restent dans le déni ? Vivant en Pologne et suivant l’actualité française, je constate tous les jours que les politiques et médias français attaquent à coups de manipulations et de fausses informations, parfois inventées de A à Z, des démocraties comme la Pologne ou la Hongrie. Comment un tel niveau de propagande, de mensonge digne de l’Union soviétique est-il possible ? Comment l’expliquez-vous ?

C’est inexplicable. Et en tout cas nous voulons que tout cela cesse.

Connaissez-vous l’ « opération ronce », qui serait un plan d’État-major de l’armée pour reconquérir les « territoires perdus de la République » ?

(Un peu gêné) Je ne sais si cette appellation est réelle. Ce que je peux vous dire c’est que c’est le devoir de l’armée de prévoir.

Nombre de ministres vous ont donné des leçons sur la responsabilité, l’honneur et la loyauté. Et notamment la ministre de la Défense. En tant que militaire, prêt à donner sa vie à la France, comment recevez-vous ces leçons de morale de ministres qui ont tous des casseroles, telle Mme Parly (ministre de la Défense) qui a touché 1 million d'€ de la SNCF pour 18 mois de travail, alors que cette entreprise publique est endettée à hauteur de 50 milliards d'€ ?

On a la démonstration que nos dirigeants politiques ne sont pas là pour servir le pays, mais pour se servir eux-mêmes. De plus leurs déclarations sont humiliantes pour des personnes qui ont servi le pays sous l’uniforme pendant des dizaines d’années et sont prêtes à lui donner leur vie. Mais ce qu’il faut que nos dirigeants politiques comprennent, c’est que les forces armées exercent un véritable sacerdoce avant tout au profit du peuple qu’elles ont pour mission de protéger.

La pétition de soutien des militaires d’active a dû vous réconforter dans votre combat mais cela ne décrédibilise-t-il pas trop nos dirigeants en dehors de nos frontières ?

C’est un vrai problème d’image que peut donner la France à l’étranger. Mais je pense que ce qui passe en France va avoir un large écho au niveau européen et va être suivi de près par des pays comme la Pologne et la Hongrie. Dans ce combat que nous menons, je considère que tous les peuples sont concernés, avec la submersion migratoire depuis 2015 qui représente une attaque sans précédent des peuples européens, déclenchée par l’État islamique qui avait annoncé en décembre 2014 qu’il allait envoyer 500 000 migrants. Au final c’est plus de 1,5 million de migrants qui sont arrivés. Pour moi c’est une attaque sans précédent sur l’Europe, que nos dirigeants n’ont pas voulu voir, dont ils n’ont pas voulu s’occuper. Ils sont fautifs.

En ce qui concerne votre projet présidentiel, il présente de larges convergences avec les propositions d’Eric Zemmour sur l’assimilation et l’immigration extra-européenne que vous souhaitez stopper, ainsi que sur le regroupement familial en instituant des mesures de préférence nationale. Vous avez un volet sécurité très ferme, notamment avec la réouverture du bagne pour les terroristes et le rétablissement des maisons de correction. En revanche, il n’y a rien sur le démantèlement des réseaux pédophiles en France ou encore le dépistage de drogues chez les députés et dirigeants politiques. Il y aussi trois volets auxquels on s’attendait moins, notamment sur l’accroissement des libertés, sur la démocratie participative via le RIC et même une partie consacrée à l’écologie. Par manque de temps je voudrais que nous nous concentrions sur votre politique étrangère : Vous parlez d’un rapprochement avec les pays membres du groupe de Visegrád, comment voyez-vous les choses ?

Pour moi l’UE actuelle ne correspond plus aux besoins des peuples européens qu’elle ignore. On oublie que ce sont eux qu’il faut protéger. Pour moi l’U.E. aujourd’hui est une usine à gaz qui ne fonctionne pas, qu’il faut revoir de fond en comble. Un lien privilégié s’est créé entre la France et l’Allemagne, qui est un grand pays et première puissance économique européenne. Mais nous voyons bien que nous n’avons pas forcément toujours les mêmes intérêts. Je ne veux pas faire de l’UE un État fédéral, mais une alliance de nations qui ont des projets communs, tout en conservant un certain nombre de particularités. Aussi je souhaite que l’on dépasse ce fameux « tandem franco-allemand », surtout que sur bien des sujets, comme l’héritage culturel et historique, moi, je me sens beaucoup plus proche de pays comme la Pologne et la Hongrie qui défendent leur identité. Encore une fois il n’y pas de honte à vouloir défendre ce que nous sommes, ce que nous avons été et ce que nous voulons continuer d’être. Pour moi, il doit y avoir des relations beaucoup plus étroites avec le groupe de Višegrad. Nous sommes appelés à travailler ensemble.

Vous souhaitez aussi un rapprochement avec la Russie. Mais, vous qui êtes un spécialiste du renseignement, vous voyez bien qu’elle a bâti des outils d’influence qui menacent notre pays. Avec d’un côté Russia Today qui est un instrument des services secrets russes pour cartographier les réseaux d’influence et identifier les points faibles, c’est-à-dire les personnes sur qui l’on peut faire pression, pour orienter nos dirigeants. Et de le l’autre le milliardaire tchèque Kretinsky, dont les revenus dépendent du gaz russe, et qui possède désormais un empire de presse en France via Marianne, Elle, Le Monde, L’Obs, Les Inrocks, etc. Comment expliquez-vous cette adoration par tout le mouvement conservateur et patriote français pour le régime autoritaire russe, qui s’est doté de tant d’outils pour faire pression sur nos dirigeants ?

Oui c’est vrai. Dans l’évolution des menaces, il y a une réflexion à mener, mais des deux côtés. L’OTAN, avec la disparition du pacte de Varsovie aurait dû disparaître. Et l’OTAN est un outil qui reste à la main des Américains et qui défend donc les intérêts des Américains. Au niveau des menaces, le monde est en pleine évolution. Dans un certain nombre de domaines, l’UE aurait dû amorcer un nouveau dialogue avec la Russie. Notamment dans le cadre de la montée en puissance de la Chine et du danger islamiste. Je pense que dans ces domaines, l’UE et la Russie ont des intérêts communs. Ce n’est pas un rapprochement complet, mais il faut se rappeler que la Russie est européenne comme nous et que nous avons des intérêts communs.

N’est-ce pas une vision quelque peu « romantique » de la Russie ? La Russie n’a pas de racines romaines, elle ne fait pas partie de l’Occident, sa tradition en ce qui concerne la gouvernance est bien plus orientale qu’occidentale, on le voit bien à travers son histoire au cours de laquelle elle n’a connu quasiment que des potentats et des tyrans. Comme dans les pays orientaux, la corruption est solidement ancrée dans les mœurs. Comment peut-on croire qu’elle pourra s’arrimer au camp occidental tant qu’elle aura un empire dont plus des 2/3 est en Asie ? Que pensez-vous de la vision américano-polonaise, développée par Zbigniew BRZEZINSKI, selon laquelle la meilleure façon d’arrimer la Russie à l’Europe est d’en faire un pays essentiellement européen, via l’abandon de toute ambition impériale sur l’Ukraine, la Biélorussie et l’Asie ?

Oui absolument, mais pour cela il faudra revenir aussi sur la place de l’OTAN. Le grand danger géostratégique sera la Chine, c’est pourquoi il faut réduire au plus vite les incertitudes avec la Russie en mettant en place des relations plus cordiales.

Notre interview se termine, souhaiteriez-vous dire un dernier mot ?

Comme vous êtes en Pologne, je voudrais saluer nos amis polonais, j’ai beaucoup fréquenté des militaires polonais. Vous voyez, (il se retourne) j’ai gardé chez moi cette jolie statuette d’un aviateur qui m’a été offerte par un général polonais. Surtout j’avais un grand ami polonais, le colonel Stanislaw Frankowski, qui malheureusement nous a quittés. Je conserve de très beaux souvenirs avec lui et sa femme. Et je voudrais profiter de cette interview pour saluer sa femme Halina.



Author: Patrick Edery

Source: Tysol.fr


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